2003 est une année charnière pour Béyoncé. Tout juste échappée des Destiny's Child, elle travaille sur son premier album solo, Dangerously in Love, sous la coupe de son manager et producteur de père, Mathew Knowles. C'est aussi l'année de l'annonce de sa relation avec Jay Z, qu'elle a rencontré quelques mois auparavant, lors de leur featuring 03 Bonnie & Clyde.
De son côté, le jeune producteur Rich Harrison est en train de se faire tranquillement un nom dans le milieu du beatmaking. Harrison est très créatif, et il a justement une instru en stock qu'il garde au chaud, en attendant de trouver l'artiste qui saura comprendre son délire. Son beat est construit autour d'un sample, celui du morceau Are You My Woman (Tell Me So) du groupe de soul vocal The Chi-Lites, sorti en 1970.
Grâce à sa réputation grandissante dans le milieu du R'n'B, il parvient à obtenir de Béyoncé qu'elle vienne à son studio pour écouter certaines de ses compositions et surtout sa trouvaille. Mais problème : Rich Harrison est un gros fêtard. Il se prend une cuite monumentale la veille et arrive à la bourre au rendez-vous, les yeux bien rouges. Mais bon, il arrive quand même à lui faire écouter son travail.
A la première écoute, Béyoncé hésite : on n'utilise plus de cuivres dans le R'n'B depuis les années 90. Cela dit, l'air est entraînant, et elle se met à fredonner dessus. Puis elle demande à Harrison d'écrire des paroles pour accompagner cette mélodie et s'éclipse en lui disant qu'elle revient dans deux heures. Harrison relève le défi, non sans difficulté : réussir à allier pression, gueule de bois et créativité n'est pas donné à tout le monde. Deux heures plus tard, Crazy In Love est écrit autour du thème d'un amour irrationnel et incontrôlable. Béyoncé revient, modifie une partie des paroles, enregistre la chanson, et le tout est envoyé à Jay Z plus tard, afin qu'il pose son couplet.
A sa sortie, l'accueil critique et commercial est très positif. Le clip qui accompagne la chanson remporte trois prix aux MTV Video Music Awards. Le titre, lui, remporte le prix de la meilleure chanson R'n'B et de la meilleure collaboration rap/chant lors des Grammy Awards. Il se place en tête des ventes aux USA et grimpe dans le top 10 des hit-parades de nombreux pays. Un magazine britannique le nomme meilleur titre de la décennie. Rien que ça.